Cérémonies Comité de Bugeat 2018
Cérémonie des Bordes de Bonnefond du 6 mai 2018
Intervention de Bernard BOUCHE pour le comité ANACR de Bugeat, en présence de nombreux maires et élus, du président du PNR, de Mme Simandoux et M. Petit conseillers départementaux et de M. Chasseing sénateur.
C’est avec plaisir mais surtout beaucoup d’émotion et de respect pour ceux dont les noms sont ici gravés sur cette pierre, qu’au nom de l’Association Nationale des Anciens Combattant et Amis de la Résistance, je m’adresse à vous aujourd’hui 6 mai 2018.
Oui un mois de mai, qui même 50 ans après, doit rappeler des souvenirs à certains d’entre vous ! «Du passé faisons table rase » qui ne connaît ces paroles de l’Internationale, peut-être l’avez-vous chantée à l’époque dans les manifestations ouvrières ?
Aujourd’hui, d’aucuns ne la chantent pas, mais pourtant ils appliquent à la lettre cette « doctrine » du passé faisons table rase. Ils ne descendent pas non plus dans la rue, c’est à coup d’ordonnances ou de votes (hélas) par des élus de la Nation, qui s’attaquent à tous les grands acquis sociaux conquis par les luttes de 1936, de 1968 et même au programme social du Conseil National de la Résistance, adopté en pleine guerre le 15 mars 1944 « pour une France plus démocratique et socialement plus équitable que celle de 1939 » : à ce titre notre association ANACR est interpelée.
Oui le mois de Mai a donné plusieurs rendez-vous à l’Histoire, dont le 27 mai 1943 date de la création du Conseil National de la Résistance : un acte politique majeur de l’unité de la Résistance, voulu par le général De Gaulle depuis Londres et confié en France à Jean Moulin.
Le CNR, malgré la guerre et l’occupation de notre pays, s’engagera très vite dans la rédaction d’abord appelée d’une Charte de la Résistance porteuse des principes d’organisation future de la société française. Mais le général De Gaulle voulait aussi redonner à la France sa grandeur après des années de collaboration avec l’ennemi et de corruption des « élites » comme il disait en parlant de la grande bourgeoisie, qui soutenait massivement Pétain.
Le programme du CNR sera signé par tous les représentants des partis et organisations concernées, dont les 2 grandes centrales syndicales la CGT et la CFTC, le 15 mars 1944.Toutes ses réformes économiques et sociales ont ainsi pour base le concept de la démocratie la plus large.
Le plan social du CNR comprend la Sécurité sociale pour « Vivre sans l’angoisse du lendemain, de la maladie ou de l’accident du travail, en cotisant selon ses moyens et en recevant selon ses besoins » ; l’amélioration des conditions de vie et de travail, l’extension des droits sociaux considérés comme « des mesures de justice sociale et comme moteur de l’économie nationale ».
Oui un programme que d’aucuns devrait prendre le temps de relire et même pour d’autres, je ne pense pas me tromper, de tout simplement le lire pour la première fois de leur vie, cela ne leur ferait pas de mal.
L’an prochain, nous fêterons, j’espère, le 75e anniversaire de la publication du programme du Conseil National de la Résistance unie et aussi la Libération de la France.
Le grand Résistant Raymond Aubrac déclarait pour le 60e anniversaire du programme du CNR, je le cite : « Dans une civilisation qui distribue quotidiennement aux citoyens la peur du lendemain, on se doit de reformuler quelques grandes perspectives fussent-elles utopistes, afin de sortir de l’accablement qui fait accepter n’importe quoi à la société ». Comme il avait vu juste !
En effet, pourquoi en 2018 en Europe et plus particulièrement en France, devrions accepter le modèle du moins disant social ? A savoir un code du travail de la précarité et vidé de sa substance, une durée du travail liée à la flexibilité à outrance. C’est aussi la culpabilisation des retraités, leurs pensions seraient trop élevées, alors qu’autrefois, nos dirigeants se faisaient un devoir de ne pas toucher à la retraite des vieux « afin que ceux-ci puissent finir dignement leurs jours ».
Accompagné d’une diabolisation des fonctionnaires, c’est aussi le sabordage organisé de tous les services publics, y compris celui de la santé, afin de pouvoir les confier au privé, en application des directives européennes et permettre ainsi aux actionnaires de se goberger de dividendes et dont les PDG verront leurs salaires grimper en fonction du nombre des licenciements !
Bref tourner le dos aux mesures, de justice sociale et considérées comme moteur de l’économie : des mesures voulues par le programme du CNR.
Alors, ici dans ce haut lieu de la Résistance corrézienne, devant cette stèle mémorielle, sommes- nous condamnés à renoncer, à admettre que le combat de tous les Résistants et Résistantes était inutile, car au XXIe siècle les hommes et les femmes rêveraient de tout autre chose !
Indignez-vous clamait il n’y a pas si longtemps un autre grand résistant, décédé depuis, Stéphane Hessel et il avait raison et il a toujours raison !
Lucien Niarfaix, Charles Terracol, René Dumas, Louis Brousse, Roger Lavielle, André Laval vous avez payé de votre vie pour la liberté de la France, en résistant et luttant contre l’Allemagne nazie. Dans notre livre de témoignages sur la résistance dans le canton de Bugeat plusieurs dizaines de témoignages évoquent les nombreux résistants et résistantes hélas disparus aujourd’hui des Bordes et de Chadebec, et bien sûr le président de notre comité ANACR de Bugeat, Raymond Vergne, que je salue très fraternellement en votre nom à tous. Que Raymond se rassure et les familles des résistants aussi, à l’ANACR, nous réaffirmons haut et fort que nous continuerons à faire connaître et partager votre lutte, vos valeurs, celles de la Résistance et de son programme, pour plus de justice sociale et pour la Paix, car notre monde connait encore trop de guerres, de misère et des peuples qui souffrent. Enfin oublions pas que la bête immonde n’est pas encore totalement terrassée, loin s’en faut. Sur notre continent meurtri par les guerres tout au long de son histoire, une Europe unie et en paix aurait pu être une belle réalisation. Hélas l’Europe ne fait plus rêver, elle est même souvent honnie par ses peuples. Ce qui permet à des organisations xénophobes, racistes et d’extrême droite de relever la tête et de prospérer.
Alors, oui, plus que jamais la vigilance s’impose. Mais si notre association de la Résistance ANACR est concernée, c’est chacun de nous, chacun de vous, qui doit être vigilant et agir, avant qu’il ne soit trop tard.